Ces dernières années, les films et séries traitant de l’environnement se sont multipliés. S’ils participent à une prise de conscience globale de l’urgence climatique, leur impact est difficilement quantifiable. Ces productions favorisent néanmoins les débats.
En 2024, les Françaises et Français ont passé en moyenne 4 heures 23 par jour à regarder des vidéos, selon les chiffres de Médiamétrie. Le visionnage de fictions, films ou séries, représente 60% des vues. Les scénarios des films et séries binge-watchés à nos heures perdues influencent notre perception. Alors que le changement climatique s’immisce de plus en plus dans les nouvelles productions, est-il possible d’en mesurer l’impact ? Nous avons mené l’enquête.
Une étude menée par l’université texane Rice a analysé les 250 films les plus populaires entre 2013 et 2022. Seuls 12,8% d’entre eux traitent de l’environnement, directement ou en filigrane. Dans le milieu cinématographique, un indicateur est utilisé pour mesurer la composante environnementale d’un film : le « Climate Reality Check ». Ce test évalue en deux questions – « Le climat existe-t-il dans l’histoire ? » et « Un personnage en parle-t-il ? » – la reconnaissance de l’enjeu climatique à l’écran. Si entre 2013 et 2017, seuls 8,8% des gros succès mentionnaient un terme lié au climat, ce chiffre passe à 17,6% pour les productions entre 2018 et 2022. Avec en prime, une explosion des audiences !
Don’t Look Up, une métaphore satirique de l’inaction climatique
Qui n’a pas vu Don’t Look Up, ce film d’Adam McKay au casting cinq étoiles (Leonardo DiCaprio, Jennifer Lawrence, Meryl Streep, …) diffusé sur la plateforme Netflix ? Véritable phénomène culturel mondial, il dépasse les 360 millions d’heures vues au premier trimestre 2022 et figure encore aujourd’hui parmi les 10 films Netflix les plus regardés à leur sortie. Pour ceux qui ont hiberné durant trois ans, voici le pitch : alors que deux scientifiques découvrent qu’une comète menace de détruire la terre dans les prochains mois, médias, gouvernement et population répondent par l’indifférence et le cynisme. Adam McKay livre un message limpide en dénonçant l’inactivité face au changement climatique. « Il n’y a pas d’histoire plus importante à raconter que la crise du climat », défend-t-il dans les lignes de Télérama.

Crédit photo : Netflix/Don’t look up
Plusieurs climatologues, dont Peter Kalmus et Katharine Hayhoe, ont salué la justesse du message de Don’t look up. Ce film a irrévocablement suscité le débat. Plusieurs ONG environnementales l’utilisent désormais comme outil de communication et de pédagogie, à l’image de Greenpeace. Cependant, l’impact d’un tel film et les prises de conscience qui en résultent sont difficilement mesurables. Si Don’t look up est salué pour sa capacité à vulgariser l’inaction face à une catastrophe scientifique annoncée, aucune étude n’a, à notre connaissance, démontré la prise de décisions environnementales concrètes suivant ce succès Netflix.
Don’t look up a marqué les esprits, mais les dystopies climatiques ne datent pas d’hier. Publiée en 2022, l’étude « Le climat dans les films catastrophe, dystopiques et post-apocalyptiques » analyse 55 films de fiction produits entre 1960 et 2021, sous le prisme de la représentation climatique. Du Jour d’Après à Interstellar, en passant par Wall E et Divergente, les conclusions soulignent la fonction pédagogique et réflexive de la fiction. Bien que les scénarios manquent parfois de rigueur scientifique, ces films reflètent les enjeux actuels et participent à une prise de conscience du risque climatique.
Les séries suivent la tendance !
En dix ans, un véritable boom a frappé l’industrie des séries à l’échelle mondiale. Le rapport annuel de FX Content Research chiffre à 513 les séries originales pour adultes diffusées à la télévision et en streaming aux USA durant l’année 2023. Un chiffre en baisse par rapport au record 2022 (600 séries diffusées), mais qui a presque doublé en dix ans ! Les séries s’emparent également de l’urgence climatique, en particulier depuis la fin des années 2010. On pense notamment à Notre Planète (2019), l’Effondrement (2019), Extrapolations (2023) ou encore Abysses (2023).

Crédit photo : Netflix/Our planet
Sur ces formats longs, les enjeux climatiques sont abordés avec plus de profondeur. Autre particularité : les spectateurs s’attachent davantage aux personnages suivis sur plusieurs saisons, développant une forme d’empathie narrative, un puissant moteur de sensibilisation. Format préféré des générations Y et Z particulièrement sensibles aux questions environnementales, les séries climatiques ont leur public.
L’impact sur ceux qui les binge-watchent reste difficile à mesurer. Ces séries participent à la prise de conscience de la crise climatique, ou du moins alimentent le débat. Les spécialistes de santé alertent cependant sur les scénarios trop sombres pouvant provoquer de l’éco-anxiété, en particulier chez les jeunes.
Le climat reste passablement absent des programmes de fiction
Si les questions climatiques sont plus visibles à l’écran depuis plusieurs années, le climat reste globalement absent des programmes de fiction, comme l’a constaté l’étude A Glaring Absence réalisée par l’université USC Annenberg et l’organisation Good Energy (2022). Sur l’ensemble des scénarios analysés, la fréquence du mot « chien » est 13 à 22 fois plus élevée que celle de termes climatiques ! Le rapport se conclut par un appel criant aux scénaristes et boîtes de production pour davantage de visibilité de l’urgence climatique à l’écran, un sujet qui intéresse les téléspectateurs.

Pour terminer, pour la rentrée, on vous laisse sur une liste de recommandations (non-exhaustive) de films et séries non-mentionnés dans cet article, en lien avec l’environnement :
- Demain (2015), film de Cyril Dion et Mélanie Laurent
- Au nom de la terre (2019), film d’Edouard Bergeon
- Okja (2017), film de Bong Joon Ho
- Into the Wild (2007), film de Sean Penn
- Occupied (2015-2020), série inspirée des polars de Joe Nesbo
- Years and years (2019), série de Simon Cellan Jones et Lisa Mulcahy
Sources :
Mediametrie
Rice University
Télérama
Greenpeace
Climatologie
FX Content Research
Université USC Annenberg
Good Energy